
« Le cancer du côlon doit cesser d’être un tabou. »
À 55 ans, Isabelle apprend qu’elle est atteinte d’un cancer du côlon. Aujourd’hui en rémission, elle a décidé de prendre la parole sur ce sujet et de faire connaître Mars Bleu pour encourager le dépistage des cancers colorectaux.
Mars 2025 (n°405) – Texte : Chloé Dussère
Temps de lecture : 5 minutes
Il n’est pas rare que des personnes malades contactent directement notre rédaction pour partager leur histoire dans un but préventif. Isabelle, diagnostiquée pour un cancer du côlon en novembre 2023, en fait partie. « Je me bats pour que ce cancer ne soit plus tabou », nous a-t-elle écrit. C’est donc sans détour qu’Isabelle nous raconte le moment où la maladie est entrée dans sa vie : « Je me suis mise à souffrir de diarrhées et à constater la présence de sang dans mes selles. Malgré des intestins un peu fragiles mais un mode de vie très sain, je savais, au fond de moi, que quelque chose n’allait pas ». Des examens complémentaires confirment ses doutes. Isabelle est atteinte d’un cancer du côlon de stade 3.
Mère de deux grands enfants qu’elle élève seule et très investie dans son travail au sein d’un cabinet de recrutement international, la jeune quinquagénaire ne se laisse pas le temps de s’apitoyer.
Quelques jours après le diagnostic, le programme des mois à venir est annoncé : 28 séances de radiothérapie associées à cinq semaines et demie de chimiothérapie médicamenteuse suivies de cinq cycles de chimiothérapie. Mais avant cela, un passage au bloc s’impose pour une iléostomie. Cette opération consiste à créer une ouverture dans l’intestin grêle pour évacuer les matières fécales via une poche à l’extérieur du corps. Même si ce dispositif est annoncé comme provisoire, c’est, pour Isabelle, l’épisode le plus difficile à surmonter. « Avant la maladie, j’ai toujours été très sportive et j’avais le contrôle de mon corps ; la stomie a tout remis en question, elle m’a obligée à lâcher prise, raconte Isabelle. Et si personne ne la remarquait, c’était très contraignant ; je devais notamment la vider trois fois par nuit et toujours avoir du matériel de rechange dans mon sac. »

Le cancer m’a appris à apprivoiser l’incertitutde. »
Isabelle
Non sans en subir les effets secondaires (nausées, fatigue, brouillard cérébral…), Isabelle répond bien au traitement et sa rémission est annoncée en juin 2024. Mais le combat ne s’arrête pas là. Au moment de l’opération, qui consiste à « nettoyer » l’endroit où se trouvait la tumeur, Isabelle développe une infection qui se révèle être une appendicite « explosée ». Une autre opération s’impose, puis une dernière pour rétablir la continuité digestive. Isabelle est mobilisée plusieurs semaines à l’hôpital. « Alors que mon moral avait tenu jusque-là, j’ai craqué face à toutes ces complications et c’est la Ligue zurichoise contre le cancer qui m’a aidée, précise-t-elle. J’ai bénéficié du soutien précieux d’une psychologue. Le fait d’avoir fait un burn-out par le passé m’a aussi permis de mieux me connaître et d’affronter le cancer plus sereinement. » Comme de nombreuses personnes malades, Isabelle doit ensuite faire face à l’après-cancer et, contrairement à ce qu’elle imagine, reprendre son travail à 100 % lui est impossible. « La fatigue et le brouillard cérébral m’empêchent de retrouver le niveau professionnel que j’avais avant la maladie, explique-t-elle. Heureusement, je peux bénéficier d’une reprise thérapeutique à 50 % sans objectif de performance alors j’essaie de mettre mon perfectionnisme de côté et j’avance. »
Un peu plus d’un an après son diagnostic, l’heure est, pour Isabelle, à la reconstruction et celle-ci passe par la transmission. « J’aurais dû refaire une coloscopie en 2018, comme c’est conseillé à 50 ans, cela m’aurait permis d’éviter le cancer, analyse-t-elle. Il n’y a pas de honte ou d’inquiétude à avoir par rapport à cet examen ; il n’est pas douloureux et évite le pire, car on sait qu’un cancer est plus facile à soigner s’il est diagnostiqué tôt. » Si Isabelle est en rémission, elle apprend encore tous les jours à accepter celle qu’elle est devenue, poussée à lâcher prise. « Le cancer m’a appris à apprivoiser l’incertitude, conclut-elle. Moi qui pensais avoir le dessus sur mon corps, je le remercie aujourd’hui de m’avoir soutenue pendant toutes ces épreuves. Je sais aujourd’hui que je peux compter sur lui. »
Ça m’a aidée !
Le soutien d’un psychologue pour accompagner la fin des traitements et surtout l’après-cancer, une étape presque plus difficile à surmonter que la maladie elle-même.
L’écriture pour prolonger l’expérience du cancer, mettre des mots sur ce vécu et sensibiliser à l’importance du dépistage. Le livre-témoignage d’Isabelle est en cours de finalisation.
Instagram, un réseau social qu’Isabelle a beaucoup utilisé pendant les traitements pour se sentir moins seule, échanger avec d’autres personnes malades et trouver un soutien via le compte nommé « le club des guerrières » au début et passé à « mlleglamisa ». Une oncologue l’a d’ailleurs contactée via lnstagram pour lui proposer de participer à un podcast. À suivre.
La méditation(1), une pratique qu’Isabelle a découverte il y a quelques années pendant son burn-out. Pendant ses traitements, elle a médité tous les matins après la prise de ses cachets de chimiothérapie. Un rituel qui lui a apporté beaucoup de sérénité et de pensées positives.
(1) Reconnue par la loi de modernisation de notre système de santé, elle s’inscrit dans l’ambition de la Haute Autorité de santé (HAS) de garantir à chacun des soins de qualité.