Depuis septembre 2022, le Pembrolizumab bénéficie d’un accès précoce pour le traitement des cancers du col de l’utérus, après avoir obtenu une autorisation de mise sur le marché pour cette indication un peu plus tôt dans l’année. Cette immunothérapie peut donc désormais être administrée avant même d’avoir franchi toutes les étapes administratives habituelles. L’efficacité de son association au traitement de première ligne par chimiothérapie des cancers du col persistants, récidivants ou métastatiques avait été démontrée par les résultats de l’étude clinique de phase III Keynote-826, présentés lors du congrès de la Société européenne d’oncologie médicale en septembre 2021(1).
Un apport majeur au traitement de référence
L’étude Keynote-826, démarrée en octobre 2018 et conduite dans 19 pays, dont la France, a inclus 617 patientes. Elle a évalué l’efficacité de la combinaison immunothérapie et chimiothérapie(2) comparativement à la chimiothérapie associée à un placebo. Résultats : l’utilisation du Pembrolizumab permet de réduire de 38 % la progression de la maladie et d’améliorer de 36 % la survie globale : des résultats majeurs. Ces bons résultats ont toutefois été obtenus à condition que le score CPS des patientes – un biomarqueur qui mesure le « dynamisme » du système immunitaire des patientes vis-à-vis de leur tumeur – soit supérieur à 1, faut de quoi le traitement n’a pas d’effet significatif. Dans l’étude Keynote-826, près de 90 % des patientes de l’étude présentaient un score CPS supérieur à 1. Quant à la toxicité de cette immunothérapie, « le Pembrolizumab est bien toléré dans la plupart des cas, il n’y a pas de signal défavorable en matière de toxicité, précise le docteur Thibault de la Motte Rouge, oncologue au centre Eugène Marquis de Rennes, et qui a participé à l’étude en tant qu’investigateur. On peut rencontrer des effets secondaires, comme des problèmes thyroïdiens, des éruptions cutanées ou des troubles digestifs, mais il ne détériore pas la qualité de vie ».
Faciliter davantage encore le transport de la chimiothérapie jusqu’aux tumeurs
Le Pembrolizumab agit en rétablissant l’activité des lymphocytes T, des cellules jouant un rôle essentiel dans la réponse immunitaire antitumorale mais qui se trouvent désactivées au contact des cellules tumorales. Cette immunothérapie a déjà fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché dans le traitement de nombreux cancers (mélanome, cancer bronchique non à petites cellules, cancer de l’œsophage, etc.) avec, à la clé, des bénéfices thérapeutiques parfois majeurs. La combinaison pourrait encore être améliorée à l’avenir, grâce à l’utilisation d’« anti-corps conjugués », qui font actuelle-ment l’objet d’essais. « Ce sont des anticorps monoclonaux sur lesquels seraient fixées les molécules de chimiothérapie, qui pourraient entrer directement dans les cellules tumorales pour y larguer leurs “ charges ”, ajoute Thibault de la Motte Rouge. Mais en attendant, c’est la combinaison chimiothérapie-Pembrolizumab qui est désormais devenue le nouveau standard pour lutter contre le cancer du col de l’utérus. »
(1) N. Colombo et al., N. Engl. J. novembre 2021.
(2) Une chimiothérapie à base de sels de platine.
Le point de vue du médecin
« Cette nouvelle thérapie contre le cancer du col de l’utérus est une excellente nouvelle. Cette pathologie représente tout de même 3 000 cas par an, et 1 000 décès. Et il est très rationnel d’utiliser l’immunothérapie contre une pathologie induite par un virus, le HPV (Human Papillomavirus), qui se développe justement grâce à un défaut du système immunitaire. Mais ce nouveau traitement ne doit faire oublier qu’il existe un vaccin très efficace contre le HPV, et qu’il est très important de vacciner les jeunes, filles comme garçons. La France a malheureusement un taux de vaccination de seulement 30 %, l’un des plus faibles d’Europe. »
Docteur Thibault de la Motte Rouge, oncologue au centre Eugène Marquis de Rennes
Un traitement pour quelle population ? En France, un peu plus de la moitié des patientes atteintes d’un cancer du col sont diagnostiquées à un stade précoce. Les stades localisés avancés représentent environ 44 % et les formes métastatiques d’emblée 4 %. Une estimation du nombre de cas de maladies persistantes, en rechute ou métastatiques et susceptibles de tirer parti du Pembrolizumab (CPS≥1) chiffre, selon la Haute Autorité de santé, à 720 par an le nombre de patientes qui pourraient bénéficier de cette immunothérapie. |