S’il n’y a jamais de bon moment pour recevoir une mauvaise nouvelle, Aurélie Gaignard-Daguisé raconte que l’annonce de son cancer du sein, en avril 2021, tombait particulièrement mal. Elle se souvient : « À tout juste 40 ans, j’étais cheffe d’entreprise, maman d’un petit garçon et engagée localement pour les élections départementales ; j’ai eu vraiment l’impression que l’on me coupait les ailes ». À la clinique Tivoli-Ducos de Bordeaux (33), où elle est suivie, tout s’enchaîne rapidement : opération, chimiothérapie, radiothérapie et hormonothérapie. Sur recommandation, elle se rapproche du Comité de Gironde de la Ligue contre le cancer, où elle bénéficie de soins de support tels que le shiatsu, l’activité physique adaptée (APA) et le soutien psychologique. Mais, alors que sa santé est prise en charge, d’autres aspects de la vie d’Aurélie se compliquent : « J’étais travailleuse indépendante et certains de mes clients ont réagi à l’annonce de mon cancer en mettant fin à notre relation. Heureusement que mon mari était présent car j’ai dû faire face à une importante perte de revenus ».
En 2022, après les traitements, Aurélie retrouve du travail, cette fois comme salariée. Pendant un an, la vie reprend son cours mais, début 2023, elle commence à ressentir une grande fatigue. Les médecins pensent qu’elle souffre des effets secondaires de l’hormonothérapie. Après avoir vu plusieurs praticiens différents sans réponse, et convaincue que quelque chose ne va pas, la jeune femme demande une prise de sang. On la convoque à l’hôpital. Elle y restera près d’un mois.
Des examens complémentaires confirment une leucémie aiguë myéloïde, un cancer grave du sang. Cas extrêmement
rare, cette maladie serait causée par la chimiothérapie.
Développer un cancer à cause d’une chimio reste très rare ; cela ne remet pas en question la nécessité de ce traitement.
« Cette annonce a été d’une violence sans nom, raconte Aurélie. J’ai été hospitalisée en chambre stérile et on m’a expliqué que, sans traitement, ma survie était une question de semaines. » Une chimiothérapie est aussitôt mise en place, ainsi que des transfusions de plaquettes et de sang. Aurélie est dans un état de grande fragilité. « C’était extrêmement dur mais j’ai appréhendé cette étape à ma manière, avec tout ce que mon premier cancer m’avait appris, explique-t-elle. Contre la douleur, j’ai mobilisé toutes mes connaissances en sophrologie, méditation, réflexologie plantaire, lâcher prise par le rire même si rien n’était si évident. » Après une seconde chimiothérapie, un traitement de consolidation est mis en place. Mi-août, ses examens sont enfin positifs.
Je n’aime pas dire que je me suis battue, j’ai seulement essayé de ne pas baisser les bras.
Sans emploi, psychologiquement et physiquement encore faible et toujours sous traitement, la jeune femme, qui n’est pas officiellement en rémission, ressent pourtant une forme d’injonction à reprendre « une vie normale ». Elle raconte :
« La leucémie m’a donné l’impression d’avoir été kidnappée et m’a fait perdre ma place de mère, d’épouse, de soeur, dans ma famille, d’amie, et professionnellement, tout s’est écroulé. Je suis cassée de l’intérieur et je dois tout reconstruire. » Isolée, Aurélie renoue avec la Ligue « surtout pour rencontrer du monde », indique-telle en ajoutant que
« seules les personnes ayant vécu la maladie dans leur chair peuvent réellement me comprendre ». Elle engage également des démarches pour faire un bilan professionnel et obtenir la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé.
L’après-cancer a presque été plus difficile à supporter que la maladie elle-même.
Aurélie souhaite aussi témoigner, raconter son expérience comme elle l’a fait dans le cadre de l’opération « les malades reprennent la parole » conduite par la Ligue :
« C’est important, de partager notre vécu, de transmettre de l’espoir et de donner des éclairages que les médecins n’apportent pas toujours ».
Message reçu !
Témoignage /// « Pendant qu’Aurélie était malade, ma priorité a été de m’occuper de notre fils. Je ne pouvais pas faire grand-chose d’autre car j’avais le sentiment qu’on ne pouvait que subir la situation. Cela m’a finalement amené à être davantage présent auprès de notre enfant, à rééquilibrer les rôles, et ce n’est pas plus mal. Aujourd’hui, je reste bien sûr présent car Aurélie est moins en forme certains jours. Sur nos dix ans de vie commune, le cancer marque un creux dans notre histoire car cela a créé de l’inquiétude et des tensions. C’est à nous de reconstruire notre couple, de passer du temps à deux. J’ai envie que cet épisode soit rapidement derrière nous. »
Nicolas Daguisé, le mari d’Aurélie
_ Ça m’a aidée _
Pendant et après les traitements, Aurélie trouve des astuces pour lutter contre la douleur, le stress et pour rester mobilisée.
L’optimisme se travaille et j’en ai besoin pour avancer.
Pratiquer le lâcher-prise par le rire
Le yoga du rire consiste à mobiliser son corps et son imagination à l’aide de différents exercices pour provoquer le rire et profiter de ses bienfaits sur le corps et l’esprit. J’ai découvert cette pratique en 2015, alors que je traversais un burn-out et cela m’a beaucoup aidée pendant mes traitements, notamment pour garder un état d’esprit optimiste.
Bouger avec la marche nordique
J’ai découvert la marche nordique, une forme de marche rapide, au travers d’une association dans ma commune. En la pratiquant, je crée des liens avec les autres participants et je me remuscle. Bref, je reste et je me sens en vie !
Miser sur le partage d’expérience avec mon propre podcast
D’âme de coeur est le podcast que j’ai créé avec l’idée de partager ce qui m’a été utile pendant la maladie. Puis j’ai eu envie de le faire évoluer en allant à la rencontre de gens ordinaires qui me parlent de leur rapport au rire. J’en suis à dix épisodes, que je suis fière d’avoir pu faire aboutir.
Méditer au quotidien
Tous les matins, j’écoute une méditation de quelques minutes. C’est mon rituel pour faire redescendre la pression, relâcher les tensions et retrouver le sommeil.
Prendre ses rêves au sérieux
Un jour, en pleine méditation, j’ai visualisé que j’emmenais mon mari et mon fils tout en haut de la statue de la Liberté. Cela peut paraître dérisoire mais cette image m’aide à tenir. C’est un projet que je m’autorise maintenant à envisager.